Maine et Loire

Justice. "Je pensais que je faisais un rêve en touchant sa jambe", un homme de 61 ans jugé pour deux agressions sexuelles sur mineur

Un homme de 61 ans comparaissait au tribunal correctionnel d'Angers pour des agressions sexuelles sur mineur, dont une incestueuse. Déjà condamné pour les mêmes faits, il connaîtra son sort le 14 novembre prochain.

Publié : 25 octobre 2025 à 0h35 - Modifié : 25 octobre 2025 à 0h38 Alexis Vellayoudom

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Le tribunal d'Angers (photo d'illustration).
Crédit : Coralie Juret

C'est une affaire qui va de traumatisme en traumatisme. Ce vendredi 24 octobre, le tribunal correctionnel d'Angers jugeait un homme de 61 ans pour deux agressions sexuelles sur mineur, dont une incestueuse, commises dans un cadre familial en 1996 et en 2001. Une seule victime s'est portée partie civile.

 

Un cassette pornographique à des enfants

 

Tout commence en 2001. À l'époque, la victime, qui s'est portée partie civile, déclare avoir été victime d'attouchements de la part d'un adulte. Cette personne n'est autre que l'oncle de l'une de ses amies. Il faut remonter à la nuit du 24 au 25 mai 2001. Trois petites filles dorment chez la grand-mère de l'une d'elles. Se joint à la soirée, l'oncle, le dernier d'une fratrie de 14 enfants. Il décide de dormir dans la même chambre que sa nièce et ses deux copines. Avant de se coucher, il fait visionner, selon les témoignages, une cassette d'un dessin animé pornographique. VSH qui sera retrouvée lors de la perquisition la même année. Un acte qu'il reconnaîtra. "Je n'ai pas réfléchi", expliquera-t-il dans sa déposition.

 

Mais le sexagénaire ne se serait pas arrêté là. Selon l'une des amies de sa nièce, il aurait, le lendemain, glissé sa main sous le pyjama de la jeune fille, puis inséré un doigt dans son vagin avant qu'elle ne le repousse. La petite est partie en pleurs. Accusations qu'il réfutera affirmant avoir "juste touché" les fesses de la jeune fille lors d'une partie de football. Des propos sur lesquels il reviendra en 2020. Pour la cassette, "je n'ai jamais montré cette cassette. Je leur ai montré le film American Pie", explique t-il à la barre.

 

"Dans mon rêve, c'était trop beau"

 

L'affaire prendra une autre tournure en 2021, lorsque la nièce est de nouveau auditionnée. Elle révèle avoir subi des agressions sexuelles, chez elle, à Grez-Neuville, en 1996. Une fois aux toilettes, elle le surprend nu, en montrant son sexe, son oncle lui dit : "Tu veux toucher ?". Une version qu'il confirmera. Le sexagénaire, déjà condamné en 2017 à 2 ans d'emprisonnement avec une mise à l'épreuve pour agression sexuelle sur une autre de ses nièces et détention d'images pédopornographiques, se perd dans ses affabulations. Sur un attouchement, il se défend : "Je pensais que je faisais un rêve en touchant sa jambe et en remontant vers sa poitrine. Dans mon rêve, c'était trop beau". "Vous trouvez ça normal de rêver de jeunes filles nues ? Pourquoi les petites filles dorment dans votre chambre ?", l'interroge l'une des juges. Le prévenu "aux capacités intellectuelles en dessous de la moyenne" selon l'analyse psychiatrique, ne comprend pas la gravité des faits. 

 

S'il reconnaît les faits pour sa nièce, il dément catégoriquement pour l'amie. "Elle fait ça pour de l'argent", argumente-t-il. "De l'argent, à 7 ans ?", reprend la juge. Agacé, Me Orhan, avocat des parties civiles, lui demande : "Vous dîtes que c'est une menteuse, dites-lui en face". L'homme s'exécute. Plus tard, la victime confiera en pleurs : "Je revois sa main, et après, je suis partie. Il a fallu que j'en parle". D'après l'expertise psychiatrique, ce traumatisme a influé sur sa personnalité avec un problème de dissociation. "Je fais ça pour mes enfants. Aujourd'hui, je ne veux pas laisser partir ma fille avec un homme âgé."

 

Un suivi socio-judiciaire requis

 

Dans sa plaidoirie, Me Orhan, avocat de la partie civile, défend : "c'est objectivement un prédateur. C'est un pervers avec une vie consacrée à des comportements déviants". Il réclame 15 000 € de préjudices au titre des dommages et intérêts. Dans une lettre adressée à la cour, la nièce de l'accusée, qui ne s'est pas portée partie civile, demande aussi 15 000 € pour le "traumatisme" qu'elle a subi. Dans la foulée, la procureure Manon Servant appuie la thèse du prédateur : "Il se met en capacité à pouvoir toucher des enfants. Il avait nécessairement conscience de ce qu'il faisait". Elle réclame un suivi socio-judiciaire pendant 5 ans avec une interdiction de paraître devant les établissements scolaires. En cas de non-respect, il encourt 3 ans de prison avec une interdiction de toute activité avec mineur à titre définitif, une privation d'inéligibilité de 5 ans et une inscription au FIJAS, le fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes. 

 

Enfin, l'avocat de la défense Me Richou rappelle le parcours cabossé de son client. Un homme battu par son père. Élevé dans un contexte familial sans pudeur et une relation plus que fusionnelle avec sa mère. L'homme cumule les traumatismes comme cette fellation forcée, subie lors de son service militaire. "Il est ensuite devenu le bon oncle, toujours là pour aider et amuser les enfants", retrace l'avocat. "Je ne voulais pas qu'ils soient malheureux comme j'ai été", dira l'accusé. "Il n'est pas capable d'être prédateur, il n'a pas les capacités intellectuelles et émotionnelles. C'est un gamin", conclu Me Richou. Il réclame une confusion de peine avec la condamnation de 2017, ainsi qu'une réduction des préjudices demandés au titre de "l'absence d'expertise". Pour l'interdiction de paraître devant un établissement scolaire, il s'insurge : "De là, à dire que c'est un danger, ce n'est pas tolérable". 

 

Au moment de prononcer un dernier mot, avant que les juges se retirent, l'accusé s'est écroulé, nécessitant sa prise en charge par les pompiers et provoquant la suspension de l'audience. Elle se poursuivra le 14 novembre.