Angers Loire Métropole. Immersion au centre de pilotage du Territoire Intelligent où sont connectés la majorité des équipements publics
Depuis 2021, Angers Loire Métropole s'est lancé dans un vaste projet de Territoire Intelligent. Aujourd'hui, plus de 56 000 équipements de l'espace public sont connectés à l'hyperviseur, une sorte d'ordinateur central capable de traiter plusieurs tonnes de données et de piloter certains équipements.
Publié : 22 avril 2025 à 16h08 - Modifié : 22 avril 2025 à 16h11 Alexis Vellayoudom
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C'est en quelques sortes, l'une des pièces les plus sensibles d'Angers. Dans le quartier Saint-Serge, depuis 2021, le projet Territoire Intelligent de la ville d'Angers se déploie derrière les vitres d'un immeuble détenu par EDF. Au dernier étage, neuf agents, tous habilités à différents degrés, contrôlent le centre de pilotage. C'est dans ces salles que remontent les informations en temps réel plus de 56 000 équipements de l'espace public sur l'ensemble de la métropole. Immersion.
Éclairage, arrosages et feux contrôlés à distance
Dans une salle aux vitres teintées, les opérateurs du centre de pilotage font face à de grands écrans. C'est l'hyperviseur, une sorte d'ordinateur central auquel sont connectés les équipements de l'espace public. "C'est un centre névralgique pour la collectivité dans lequel on va collecter l'ensemble des informations sur le territoire d'Angers Loire Métropole. Pour tous les équipements qui sont connectés à l'hyperviseur, on a leur état de fonctionnement. C'est-à-dire qu'on sait exactement détecter s'il y a une anomalie de communication, de fonctionnement ou même de vandalisme. On a également les capacités d'avoir l'ensemble de leur consommation énergétique", explique Guillaume Cesbron, responsable du centre de pilotage pour Angers Loire Métropole.
Mais le plus impressionnant reste le contrôle à distance de plusieurs équipements. Contrôle de l'arrosage pendant les sécheresses, éclairage public ciblé, programmé et individualisé lors des Accroche-Coeur (NDLR : 30 000 LED pourront être pilotées à distance dans les prochains mois) ou encore les bornes piétonnes dans le centre-ville au passage de la Flamme olympique. Les agents peuvent aussi contrôler les feux, utiles, notamment les soirs de match de football d'Angers SCO. Guillaume Cesbron en fait la démonstration via l'écran : "On a la possibilité de piloter l'ensemble des plans de feux pour fluidifier la circulation. Changer les carrefours à feux notamment voies sur berges lors de certains matchs de foot. Là, on voit systématiquement sur l'écran l'état du feu donc là, il est bien en tricolore. Si par exemple, il était passé en orange clignotant, ça générerait un défaut et une alarme critique qu'on traiterait ici au centre du pilotage."
Anticiper les risques
Grâce à l'hyperviseur, les agents peuvent aussi mesurer en temps réel les compteurs d'eau ou la température des bâtiments publics pour détecter des défauts de chauffage. D'autres données peuvent aussi aider les secours lors d'incendie : "On est en relation permanente avec les équipes du SDIS. Par exemple, sur un incendie dans un parking souterrain, on est connecté aux barrières, ça nous permet de les informer immédiatement du nombre de véhicules présents sur place pour leur permettre d'adapter leurs moyens."
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Alors pour mettre au point ce système, Angers Loire Métropole a collecté des tonnes de données pendant plusieurs années, mesure et modélisation de 123 000 bâtiments, prises de vue aérienne, données des sous-sols, etc. Elles ont été rentrées dans un jumeau numérique, une sorte de modélisation 3D de tout le territoire. "Ce qui a mis le plus de temps, c'est de créer tous les scénarios par direction, par cas. Selon les besoins, selon les urgences, les services, les problématiques techniques, il a fallu voir tout ça avec toutes les directions métiers sur tous les métiers de l'agglo avant de pouvoir avoir un hyperviseur efficace", souligne Constance Nebbula, élue en charge du Territoire Intelligent. À tel point que le centre de pilotage est capable aujourd'hui de simuler et d'anticiper des situations comme la construction de nouveaux quartier, l'implantation d'arbres ou les crues de janvier dernier. "On a les données des anciennes crues, mais aussi celles du GIEC (ndlr : Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) qui permet de simuler des situations en 3D. On peut avoir une projection et un suivi sur 72 heures", précise Guillaume Cesbron.
La technologie au service ou en remplacement de l'humain ?
La question brûle les lèvres lorsqu'on voit les prouesses du projet. "L'humain est au cœur du dispositif. Ces outils ne sont qu'une aide pour faciliter la prise de décision. Par contre toute action sur les équipements reste à l'initiative de l'agent, aidé par les données collectées via les outils numériques. On est des généralistes", rassure rapidement Guillaume Cesbron. D'ailleurs, le centre de pilotage est en contrat de service avec l'ensemble des collectivités et des directions de métiers. L'outil ne permet pas répondre à toutes les alertes, environ 5 000 alarmes de criticité par mois. À l'inverse, les agents du centre peuvent aussi être informés de problèmes remontés par les agents. "Dans ces cas-là, on recense et on traite."
Et puis, il y a toujours le risque de l'informatique et d'une cyberattaque. Celle de 2021 avait obligé les agents de la ville d'Angers à revenir au papier. Le coût de cette cyberattaque a été estimé à 150 000 €, puis 100 000 € par an pour la reconstruction et la sécurisation de son réseau. "Ça nous a obligés à prendre nos précautions. Aujourd'hui, on est hébergé sur un cloud souverain de notre partenaire Docaposte et on fonctionne avec différents degrés d'habilitation et d'accréditation pour piloter les feux ou caméras de surveillance. On se prémunit au maximum du risque cyber."
Dispositif anti-intrusion dès cet été
Et Angers Loire Métropole n'en finit pas se connecter. D'ici 2026, plus de 70 000 équipements seront reliés à l'hyperviseur. Les prochains sujets : les déchets en verre et les dispositifs anti-intrusion. Pour le premier, une expérimentation a été réalisée l'année dernière sur l'ensemble des conteneurs en apport volontaire, déchets ménagers, plastique et verre. "On a mis des sondes de remplissage et permettre en fonction de la hauteur de remplissage de pouvoir optimiser les tournées de collecte et de réduire notre impact environnemental, notamment avec des camions déchets qui sont très consommateurs de carburant. C'est du 70 litres au 100", précise Guillaume Cesbron. Seule l'expérimentation sur le verre s'est avérée concluante. La direction des déchets déploiera officiellement ce dispositif l'année 2025/2026. "Ça va aussi nous permettre d'augmenter la durée de vie de nos conteneurs à plus de 2 ans."
Dans le même temps, la collectivité réinternalise toute la sécurité des bâtiments publics. Aujourd'hui, il y en a près de 150 en télésurveillance. "Les données remonteront au centre et seront traitées, à la fois au niveau anti-intrusion, contrôle d'accès et vidéo surveillance. Ce qui nous permettra d'avoir une réactivité en cas d'intrusion sur nos bâtiments et de déclencher rapidement les forces de l'ordre." Enfin, ALM doit encore se pencher sur la partie eau et assainissement, secteur encore peu relié à l'hyperviseur. Plusieurs projets qui devraient être mis en place après le déménagement prévu pour le 1er trimestre 2026 dans l'ancienne Banque de France, acheté 2,6 millions d'euros par Angers Loire Métropole. L'équipe du centre de pilotage devrait passer à 18 agents.