Séisme en Syrie. "On a sauté du lit et on s'est réfugié sous une table", témoigne un ligérien

Jean-Rémi habite depuis deux ans à Alep en Syrie où il est chef de mission adjoint pour l'association SOS Chrétiens d'Orient. Avec sa femme et sa fille, ils ont vécu le séisme. Il constate la catastrophe humanitaire sur place.

10 février 2023 à 14h16 - Modifié : 10 février 2023 à 14h23 par Alexis Vellayoudom

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Au petit matin, Jean-Rémi n'a pu que constater les dégâts dans Alep
Crédit : SOS Chrétien d'Orient

C'est une catastrophe humanitaire qui se déroule en ce moment en Syrie. Lundi, le pays du Moyen-Orient, tout comme son voisin la Turquie, a été touché par un séisme de magnitude 7,8 sur l'échelle de Richter. Le bilan humain continue de grimper avec à ce jour 22 000 morts. Jean-Rémi Méneau, 29 ans, est un Français originaire des Pays de la Loire. Ce chef de mission adjoint pour l'association SOS Chrétiens d'Orient, habite à Alep en Syrie depuis deux ans. Il a vécu les secousses. Il témoigne. 

 

Jean-Rémi, qu'est-ce que vous faisiez au moment des premières secousses ? 

 

"J'étais chez moi avec ma femme et ma fille en train de dormir. C'était en pleine nuit et à 4h17 du matin, heure locale, on s'est fait réveiller par ce terrible tremblement. On a sauté du lit et on a été se réfugier sous une table afin de se protéger de potentielles effondrements ou de choses qui pouvaient tomber du plafond. On a entendu tous les voisins descendre très rapidement les escaliers donc on suivi le mouvement. On a été se réfugier dans la rue pour éviter de potentielles répliques. Il y avait des centaines de personnes. Il faisait moins de 5 degrés, il y avait de la pluie diluvienne qui tombait sans arrêt. On a passé trois heures dans ces conditions terribles et très désagréables. Et puis on commençait à se poser des questions, est-ce qu'on peut retourner à l'intérieur, est-ce qu'il faut toujours attendre. On a appelé le chauffeur de notre organisation pour pouvoir mettre à l'abri nos bénévoles ainsi que ma famille pour ensuite revenir sur Alep et effectuer les premières évaluations des besoins de la population". 

 

Jean-Rémi témoigne des premières secousses
Crédit : Alexis Vellayoudom

 

Dehors, c'était le chaos ? 

 

"Des dizaines de bâtiments se sont effondrés en enterrant des corps avec eux. Il y a malheureusement beaucoup de morts. Nous, on dénote un prêtre dont on était assez proche qui a été retrouvé sans vie sous les décombres. Mais il y a également des miracles. Il y a une petite fille qui est née pendant le tremblement de terre et qui a été retrouvée encore attachée par le cordon ombilical à sa mère alors que toute sa famille était décédée. C'est la seule survivante, elle a été emmenée dans un hôpital pour que les premiers soins lui soient prodigués. Les gens rejoignaient des centres qui ont ouvert au compte-gouttes que ce soit dans les écoles, les églises, et même les restaurants. Puis les blessés rejoignaient les hôpitaux pour se faire soigner. Les hôpitaux ont été débordés. Et puis on commençait à dénombrer le nombre de morts. On a entendu 26 sur Alep, mais on savait très bien que ce nombre allait augmenter. On est vraiment très attristé par cette situation et on espère que les choses vont s'arranger rapidement pour le peuple syrien".

 

Jean-Rémi décrit le chaos sur place
Crédit : Alexis Vellayoudom

 

Aujourd'hui, il y a encore des gens sous les décombres, comment s'organise l'aide sur place ? 

 

"L'organisation des secours est très compliquée parce que la Syrie ne reçoit que très peu d'aide internationale et quasiment aucune aide occidentale. Tout est envoyé à la Turquie et rien à la Syrie. Pour nous, c'est inadmissible. Quand il y a des catastrophes naturelles comme celle-ci, on ne devrait pas faire de différence en fonction de la nationalité ou des affinités politiques. Aujourd'hui, la Syrie se retrouve isolée. Depuis le début de la guerre civile, elle est considérée comme le paria de l'humanité. Et le fait qu'il y a des sanctions internationales, ne favorise pas l'arrivée de l'aide. Beaucoup de pays ont peur que s'ils envoient de l'aide à la Syrie, ils se retrouveront sous les sanctions des États-Unis ou de l'Union européenne. L'idéal, ça serait qu'il y ait au moins un arrêt temporaire des sanctions contre la Syrie afin que l'aide puisse arriver. Et que chaque pays puisse envoyer des secouristes, car, pour l'instant, pour dégager les personnes sous les décombres, il y a que la sécurité civile syrienne". 

immeuble touché par Séisme_06 02 23_SOS Chrétiens d'Orient
À Alep, un immeuble fragilisé par le séisme
Crédit : SOS Chrétiens d'Orient

 

Vous êtes la seule association française sur place de manière permanente, comment vous aidez sur place ? 

 

"Les gens se sont retrouvés dans des centres, le problème, c'est qu'ils ne sont pas équipés pour accueillir la population. Les premières urgences qu'on met en place, c'est des donations de nourriture, mais également de couche pour les bébés, les personnes âgées et des produits hygiéniques afin que ces centres puissent respecter la dignité des personnes. À moyen terme, on va aider pour la réhabilitation des maisons qui ont été très durement touchées. Si aujourd'hui, toutes les personnes sont présentes dans les centres, c'est parce qu'ils ont peur de retourner chez eux. Ils ont peur d'effondrement ou de répliques qui pourraient impacter leur logement". 

 

Jean-Rémi constate les difficultés d'acheminement pour l'aide humanitaire
Crédit : Alexis Vellayoudom

 

Pour poursuivre son aide auprès des Syriens touchés par ce séisme, SOS Chrétiens d'Orient lance un appel aux dons.