À Angers, des victimes du métam-sodium devant la justice

En 2018, 76 personnes avaient été intoxiquées au métam-sodium autour de la commune de Brain-sur-l'Authion. L'entreprise nantaise primaloire et l'un de ses salariés sont jugés pour "blessures involontaires".

22 mai 2023 à 15h52 par Alexis Vellayoudom

Illustration mâche_22 05 23_David Will
Image d'illustration
Crédit : David Will

C'est une affaire angevine qui avait rouvert le débat sur les pesticides, le procès du métam-sodium s'est ouvert cet après-midi au tribunal correctionnel d'Angers. L'entreprise nantaise Primaloire et un de ses salariés sont jugés pour "blessures involontaires" sur 76 personnes, à la suite de l'épandage du métam-sodium près de la commune de Brain-sur-l'Authion. 

 

Des manquements de l'entreprise ?

 

Les faits remontent à l'automne 2018, autour de la commune de Brain-sur-L'Authion. À l'époque, le métam-sodium, utilisé comme pesticide par les producteurs de mâches, est interdit en Europe depuis 2009. Mais la France, est l'un des rares pays à poursuivre son utilisation sous forme de dérogation au secteur agricole, en attendant de trouver une alternative. Le 9 octobre, une soixantaine d'employés de trois entreprises d'une zone d'activité horticole sont pris de douleurs à la tête, de gênes respiratoires et d'irritation aux yeux. Très vite, la situation se dégrade et porte à 76 le nombre de personnes touchées, dont des jeunes du lycée de Narcé. Au total, 17 personnes seront hospitalisées. Dans la foulée, le CHU d'Angers déclenchera son plan blanc. 

 

Quels enjeux au procès ?
Crédit : Alexis Vellayoudom

Dans la suite des événements, l'association Sauvegarde de l'Anjou, aujourd'hui renommée France Nature Environnement Anjou, porte plainte. L'utilisation du métam-sodium est alors suspendue par la préfecture. Il est reproché à l'entreprise nantaise Primaloire et l'un de ses salariés d'avoir commis des manquements dans l'utilisation du produit, "c'est un produit qui doit être appliqué uniquement sur des terres et des terrains très humides. Sur l'Authion, ça a été appliqué sur des terrains qui n'étaient pas aptes. Le produit au lieu de pénétrer dans le sol, il s'est propagé dans l'air", rappelle Régine Bruny, co-présidente de la FNE Anjou qui s'est portée partie civile comme une petite partie des victimes. 

La FNE attend beaucoup de ce procès, "la première responsabilité, c'est l'employeur. L'entreprise est responsable à la fois de la formation de ses équipes et de la bonne application des produits qu'elle utilise pour faire respecter les dosages, la façon de l'employer. Il y a aussi l'employé, il a des ordres, est-ce qu'il les a bien respectés ? Comment l'entreprise va expliquer que des salariés sur place ou des dirigeants n'ont pas respecté les règles ?"

 

L'Etat a-t-il une responsabilité ?

 

Parmi les zones d'ombres que France Nature Environnement souhaite éclaircir, c'est le degré de responsabilité de l'État dans ce scandale sanitaire. Régine Bruny rappelle : "à la suite de cette intoxication massive, les services de l'État sont allés contrôler 47 entreprises à la fois sur le Maine-et-Loire et la Loire-Atlantique où il y a la production majeure de mâche. Sur la totalité, il y en avait seulement deux qui étaient totalement en règle avec cette réglementation, tout le reste, il y avait des manquements. Ça pouvait être du matériel pas à jour ou du personnel non habilité par un certiphyto.  ". 

 

La FNE s'interroge sur la responsabilité de l'État ?
Crédit : Alexis Vellayoudom

 

Suite à ce scandale, la France via l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire, avait d'ailleurs fait retirer définitivement du marché le métam-sodium, "il y en a d'autres qui sont certainement de la même veine et pour lesquels il faut avoir des procédures de contrôle", conclu Régine Bruny.