Angers. 600 personnes ont manifesté contre les violences sexistes et sexuelles

Elles ont bravé le vent et la pluie ce samedi 22 novembre à Angers : 600 personnes ont manifesté contre les violences sexistes et sexuelles, quelques jours avant la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes le 25 novembre. Après un rassemblement devant le palais de justice, le cortège s'est dirigé jusqu'à la place de la République, où ont été cités les noms des victimes de féminicides de l'année 2025 (152 à ce jour, contre 141 sur toute l'année 2024 selon Nous toutes, ndlr), avant plusieurs chants entonnés par une chorale féministe. Le rassemblement était organisé par le comité du 8-Mars 49, réunissant plusieurs associations et syndicats : les Angegouines, Nous toutes 49, les Collages féministes, Aides, Solidaires, Corps à coeur, Attac 49, le Planning familial 49 et la FSU. Entretien avec Laura-May Simard, qui fait partie du comité du 8-Mars 49.

Parler des femmes disparues, c'était symbolique comme action ?

Oui, on donne leur prénom, leur âge quand on l'a et le jour où elles sont décédées, et on allume une bougie à chaque fois, pour symboliquement montrer ce que ça représente. Le but, c'est de faire l'inverse de l'invisibilisation qui arrive souvent. Avant, par exemple, les femmes trans n'étaient pas prises en compte dans ce décompte ; maintenant, elles le sont. C'est le cas aussi des matricides (une personne qui tue sa mère), qui en font partie. 

Pourtant, on peut avoir l'impression que l'égalité femmes-hommes progresse...

C'est vrai qu'on a tendance de nos jours à dire que "tout va mieux", "pourquoi est-ce qu'on se plaint, les droits avancent". Mais non en fait, il continue d'y avoir de la violence et les féminicides sont l'une des nombreuses manières de le montrer, de pointer du doigt que cette violence est bien réelle. Évidemment, c'est la version la plus extrême, il y a un tout un continuum de violences, mais celle-ci elle est plus facile à dénombrer.

La libération de la parole permet-elle de protéger plus de femmes et d'enfants ?

Tant qu'il manquera des moyens, ce sera difficile. Régulièrement, il y a des plaintes au commissariat qui ne sont pas prises au sérieux parce qu'il peut y avoir cette histoire de "ça regarde pas la société, ce qui se passe dans les couples, c'est privé". Et il y a les plaintes prises au sérieux, elles, mais qui ne vont pas plus loin par manque de moyens, rien ne peut être fait. C'est le cas aussi pour énormément d'associations, dont le Planning familial 49 (qui a perdu notamment la subvention de la Région Pays de la Loire l'année dernière). Par exemple, des milliers d'enfants devraient être placés en foyer mais restent avec leur famille, donc avec leur bourreau, juste parce qu'il n'y a pas les moyens d'appliquer des décisions de justice. C'est pareil pour les femmes dont les conjoints ont été reconnus violents : comme il n'y a pas de place en refuge, souvent les femmes restent parce que ça nécessite des moyens financiers de partir, surtout quand on a des enfants.

600 personnes mobilisées aujourd'hui, n'est-ce pas un peu décevant ?

Si, bien sûr, même si je pense que la météo n'aide pas... Ça reste encore assez invisibilisé et je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui ne se sentent pas concernées. Alors qu'on connaît tous et toutes quelqu'un qui a été victime de violences sexistes et sexuelles, même si on ne le sait pas forcément : c'est un fait sociétal. Parfois, ce sont des choses qui restent encore tues parce que les gens ne veulent pas entendre. Dans les cas de conjugalité, on a encore cette image parfois de "crime passionnel" pour un féminicide.

En quoi est-ce important de changer cette image pour éradiquer les violences ?

Il y a vraiment encore une romantisation des violences conjugales, du viol : il faut qu'on change la vision qu'on a de l'amour, du couple... Et on le voit d'ailleurs dans les médias, certains films sortent avec des scènes illégales, qui ne sont pas du tout nommées comme étant ce qu'elles représentent.

Il y a quand même quelques avancées, comme l'ajout de la notion de consentement dans la définition pénale du viol...

Oui, la symbolique reste forte et importante, mais si on modifie la définition du consentement sans changer les formations des personnes qui prennent les plaintes au commissariat, sans changer la formation des juges, ça ne va rien changer. Donc on revient à la question des moyens : il faut que ce soit accompagné de formations, de moyens, et en ce moment malheureusement, on est plutôt en train d'en enlever que d'en rajouter.

Si vous êtes victime de violences, vous pouvez appeler le 39 19, et en cas d'urgence, composez le 17.