Maine et Loire

Angers. À cause d'une baisse drastique de subventions, les radios associatives craignent pour leur survie

Le projet de loi de finances 2026 prévoit une baisse de 44 % du FSER, le Fonds de soutien à l’expression radiophonique. Un "financement incontournable" pour les radios associatives angevines, qui craignent de devoir se séparer d'au moins un salarié et de ne plus pouvoir assurer les ateliers d'éducation aux médias.

Publié : 27 novembre 2025 à 15h26 par Marie Chevillard

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Des bénévoles de Radio G! avec Guy Dugrais (au centre), et des membres de la JCE, invités réguliers.
Crédit : Radio G!

Elles s'étaient déjà mobilisées il y a un an - avec succès - contre une baisse annoncée de leur principale subvention versée par le ministère de la Culture. Cette fois-ci, la coupe annoncée dans le projet de loi de finances 2026 est encore plus forte : -44 % pour le FSER, le Fonds de soutien à l’expression radiophonique passerait de 35 millions d'euros en 2025 à 19 millions d'euros l'année prochaine. De quoi susciter une nouvelle levée de boucliers dans les 770 radios associatives présentes en France. Parmi elles, une trentaine est implantée dans les Pays de la Loire, et quatre dans le Maine-et-Loire : Radio G!, Radio Campus Angers, RCF Anjou et RPSFM.

 

2400 postes menacés

 

À Radio G, on craint cette baisse du FSER, "ressource incontournable pour nos radios associatives locales", précise Guy Dugrais, ancien président et actuel bénévole au sein de la radio associative angevine. Celui qui est aussi délégué du Syndicat national des radios libres en Pays de la Loire pointe la menace d'une suppression de 80 % des 3000 postes salariés des radios associatives françaises, avec cette baisse annoncée de subventions. Un poste sur les trois salariés actuels de Radio G pourrait être concerné, mais c'est un cercle vicieux, d'après Guy Dugrais. "À partir du moment où le poste de salarié n'existe plus, nous n'avons plus la capacité de rentrer des finances associées à notre mode de fonctionnement : on parle de marchés publicitaires (même s'ils sont limités à 20 % du chiffre d'affaires des radios associatives), et surtout de l'éducation aux médias avec les ateliers radio."

 

Guy Dugrais "Au niveau des territoires, nous ne représenterions plus rien"
Crédit : Marie Chevillard

 

Depuis 2023, une convention lie d'ailleurs le SNRL et l’Éducation nationale à propos de l’éducation aux médias, "reconnaissant notre rôle pour aller former dans toutes les écoles, les maisons de quartier, les centres de formation... tous confondus". Ce qui est le cas pour Radio G, mais aussi pour Radio Campus Angers : son président Patrick Haour évoque, lui, l'image du "serpent qui se mord la queue : nous, on serait obligé de se séparer d'un salarié, un salarié et demi. Or, les ateliers d'éducation aux médias sont une source de revenus pour la radio ; tout comme la partie journalistique, qui atteste de notre travail d'information locale, est une source de subventions pour ce FSER. C'est impossible de trouver l'équivalent de ce manque à gagner sans renoncer à une partie de ce qu'on fait."

 

Le mécénat d'entreprises, une solution ?

 

Parmi les autres sources de revenus, les subventions ? "On a déjà perdu celle de la Région Pays de la Loire l'an dernier, et on sait qu'elles se réduisent". Le mécénat d'entreprise ? "Oui, on se tourne vers ça, mais nous ne sommes pas les seuls..." Conséquence : si le FSER baisse de 44 %, ce serait pour ces radios associatives locales "quasiment une condamnation à mort, ce qui va à l’encontre de tous les discours du gouvernement sur l’importance de l’information locale, du lien social, du monde associatif", estime Patrick Haour. "Au niveau des territoires, nous ne représenterions plus rien ou tellement peu qu'on se retrouverait dans un état des radios associatives des années 1980", ajoute Guy Dugrais.

 

Pourquoi une telle baisse annoncée des subventions et quelles en seraient les conséquences ?
Crédit : Marie Chevillard

 

Le tout pour une économie de 16 millions d'euros, une broutille à l'échelle du budget de l'Etat, selon le président de Radio Campus Angers. "Je pense que ça va dans le sens du climat actuel, dans lequel il fait bon taper sur le monde culturel, le monde associatif, en disant 'ce sont des assistés qui ne servent à rien et vivent au frais de l'État sans rien produire'. Mais le problème, c'est l'opinion en fait, parce que si les gens trouvent que c'est une mauvaise idée, le gouvernement changera probablement d'avis."

 

"Sans éducation aux médias, la population devient influençable à souhait"

 

D'où la campagne de communication lancée par les radios associatives depuis plusieurs semaines auprès du grand public sur leurs réseaux sociaux, mais aussi auprès des élus locaux, avec un retour "plutôt positif des députés du Maine-et-Loire" d'après Patrick Haour. De quoi rassurer un peu les deux bénévoles, qui rappellent l'importance de la pluralité des médias, y compris au niveau local. "Le rôle premier des radios associatives, c'est de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas, d'avoir une information 'remontante' par rapport à d’autres médias, explique Guy Dugrais. Cette baisse du FSER reviendrait purement et simplement à assassiner la parole libre que nous garantissons auprès des gens du territoire. Nos ateliers d'éducation aux médias permettent aussi de savoir reconnaître les fake news, de reconnaître la bonne parole de la plus insidieuse. Et qui dit plus d'éducation, dit par implicite une population qui devient 'mono-pensée', influençable à souhait, on en fait ce qu'on en veut."

 

 

En commission parlementaire, deux amendements ont été votés contre cette mesure. Mais la prudence reste de mise : si le budget 2026 n’est pas voté avant la fin de l’année, le texte initial du projet de loi de finances pourrait être appliqué par ordonnances.