Angers. Près 250 personnes ont protesté contre "La Nuit du Bien commun" lancé par le milliardaire d'extrême droite Pierre-Edouard Stérin

C'est le genre de mobilisation qui pourrait se multiplier, d'un côté comme de l'autre. Angers devient petit à petit une de ces places où les tensions entre extrême droite et la gauche se cristallisent. Hier, en fin de journée et dans le calme, environ 250 personnes ont rallié le parvis de la mairie d'Angers. Un appel lancé par le groupe Visa 49, Vigilance et Initiatives Syndicales Antifascistes qui rassemble des organisations syndicales, mais aussi des associations et collectifs de gauche. Ils protestaient contre la tenue de la Nuit du Bien Commun, un événement caritatif lancé en 2017 par le milliardaire d'extrême droite Pierre-Edouard Stérin (il a quitté le Conseil d'administration de l'événement en juin, ndlr), organisé au Centre des Congrès et dans lequel des fonds sont levés pour financer plusieurs projets d'associations, dont certaines proches du milieu identitaire angevin. 

"On s'oppose aussi à la normalisation des discours d'extrême droite"

Parmi les organisations présentes, la CFDT. "On porte un projet de société et nos valeurs sont opposées à celles portées par l'extrême droite. Nous refusons le racisme, l'homophobie et toutes les formes de discriminations. Le projet que porte le milliardaire Pierre-Edouard Stérin est complètement contraire à nos valeurs, justifie Eléonore Crosnier, déléguée syndical. On s'oppose aussi à la normalisation des discours d'extrême droite. Il s'agit de marquer les esprits. Il ne faut pas que dans 10 ans, on vienne nous "vous avez rien fait". Si, on est là." En ligne de mire, le milliardiaire Pierre-Edouard Stérin, à l'origine du projet politique Périclès, (acronyme pour Patriotes / Enracinés / Résistants / Identitaires / Chrétiens / Libéraux / Européens / Souverainistes, ndlr) qui vise à faire gagner l'extrême droite en France. 

Frédérique Bras, militant CFDT, dénonce lui le rapprochement des droites opérés avec cet événement dans un bastion angevin plutôt conservateur. "La tentation qu'a l'extrême droite de se rapprocher du milieu des affaires et des milieux de la droite traditionnelle." En tête, les révélations faites par nos confrères du journal d'enquête La Topette sur l'existence d'un fonds, porté par Pierre-Edouard Stérin, impliqué dans le financement de l'Université Catholique de l'Ouest à Angers. L'établissement a depuis coupé les liens. 

Des élus de l'opposition municipale se sont aussi joints à l'assemblée. C'est le cas de Romain Laveau, écologiste Les Verts et candidat de la gauche aux municipales 2026 à Angers : "C'est un peu le cheval de Troie de l'extrême droite qui influence de plus en plus des sphères associatives et culturelles. Nous aujourd'hui, on est là pour dire non et s'opposer pacifiquement". Parmi les associations mises en avant dans cette Nuit du Bien Commun, figurent S.O.S Calvaires qui restaure les calvaires, dont le siège est au Lion d'Angers, pointé du doigt pour ses accointances avec certaines personnalités du milieu identitaire angevin, ou la Ferme pédagogique d'Orveau, projet de l'établissement Notre-Dame-d'Orveau réputée pour son enseignement rigoriste du catholicisme et où baignent des personnes issus des milieux d'extrême droite. 

"Je ne me sens pas représenté par eux", clame un catholique manifestant

C'est justement pour ça qu'Olivier a rejoint la mobilisation contre la tenue de cet événement. Ce Catholique pratiquant est président de Catholique paix, un collectif engagé sur les questions de lutte pour les droits des minorités de genre et sexuelle, pour le droit à l'avortement et contre la banalisation de l'extrême droite. Il se bat contre l'amalgame fait entre extrême-droite et catholiscime. "Je reproche aux catholiques identitaires nationalistes et d'extrême droite de faire en sorte qu'on se retrouve nous avec cette étiquette là. Ça leur permet de dire que si on les attaque eux, on attaque l'Eglise. Ce qui est faux ! Quand on les dénonce eux, c'est eux en tant qu'individu et idéologie. Moi ce n'est pas en mon nom qu'ils parlent. Pierre-Edouard Stérin il représente que lui. Ça c'est essentiel, car nous, quand on dit qu'on est catholique la première réaction c'est un pas de recul surtout face à des minorités. Notre but, c'est de dire "on peut être catholique, mais en désaccord profond avec la doctrine d'extrême droite"."

Il poursuit : "Je ne me sens pas représenté par eux. Ces gens se servent de la religion catholique pour faire avancer l'extrême droite. S.O.S Calvaires ils n'ont aucune intention de porter des valeurs d'inclusion, de partage et de proximité avec les plus démunis, qui sont à la base des évangiles. Ils mènent une guerre contre les religions. C'est terrible de voir les institutions catholiques travailler avec eux. À partir du moment où on croit en un Dieu qui a passé sa vie à la donner aux plus pauvres, lutter contre les institutions religieuses qu'empêchaient les gens de s'émanciper. On ne peut venir dire derrière que le catholicisme c'est d'être raciste, lutter contre les exilés, les personnes homosexuelles, l'avortement". 

Le rassemblement s'est terminé dans le calme, malgré la présence d'individus cagoulés. Un important dispositif de CRS avait été déployé. En parallèle la Nuit du Bien commun a permis de récolter 213 000 € pour les 8 projets, notamment le financement d'une maison pour accueillir les femmes isolés, de l'aide à la scolarisation d'enfants en situation de handicap ou la réhabilitation d'un bâtiment à Angers pour faire vivre ensemble des sans-abris et des jeunes actifs.