Angers. Un "banquet de la honte" pour dénoncer la "concurrence déloyale" des produits agricoles importés

Ils étaient une quarantaine devant la préfecture du Maine-et-Loire à Angers ce vendredi 26 septembre, à manifester devant ce qu'ils ont appelé un "banquet de la honte", avec différents produits importés : vin espagnol, poulet thaïlandais, tomates marocaines, haricots verts kenyans... Ces agriculteurs de la FDSEA et des JA 49 ont répondu à un appel national de leurs syndicats, pour dénoncer ce qu'ils estiment être une "distorsion de concurrence", avec des produits souvent moins chers que du 'Made in France', mais aussi moins traçables et pas forcément respectueux des normes environnementales françaises. Entretien avec Anthony Ménard, secrétaire général de la FDSEA du Maine-et-Loire et éleveur près d'Angers.

Pourquoi avoir choisi d'organiser un "banquet de la honte" ?

Parce qu'on voit bien la différence entre les deux tables, autour desquelles nous avons discuté avec M. le préfet et quelques sénateurs du Maine-et-Loire. Sur la table en face, des bons produits du Maine-et-Loire, avec par exemple de la rillette, des pommes, du vin... Alors que sur cette table-ci, on a été chercher plein de produits en grande surface, qui sont importés. On veut montrer aux concitoyens qu'il y a aujourd'hui des attentes sociétales, environnementales, de bien-être animal, qui sont louables et qu'on entend totalement. Mais l'acte d'achat des consommateurs n'est pas toujours en adéquation avec ces attentes sociétales.

N'est-ce pas seulement une histoire de pouvoir d'achat ?

Oui, ça doit sans doute jouer aussi, mais je pense qu'en regardant de près, on peut trouver des produits d'origine française à des prix totalement abordables. Il suffit juste de prendre aussi un peu de temps dans la recherche. Aller acheter des produits à un agriculteur, en circuit court, ça n'est pas forcément plus cher que de les acheter en grande surface.

Quels exemples retenez-vous des produits présents à ce "banquet de la honte" ?

On a trouvé des morceaux de poulet pané qui viennent de Thaïlande, sur lequel on n'a aucune provenance, aucune traçabilité du mode de production. Et quand on demande à M. le préfet "pouvez-vous nous trouver la traçabilité de ce poulet ?", on sait très bien aujourd'hui que les services de l'Etat en sont incapables. À l'inverse, si vous achetez un steak hâché français, on peut vous dire de quel élevage il provient, quelle était la vache, ce qu'elle a mangé... On a une chaîne de traçabilité en France qu'on ne retrouve pas sur ces produits importés.

Les conditions de production ne sont pas non plus les mêmes...

Non, on a aujourd'hui des molécules chimiques, des antibiotiques ou des produits phytosanitaires, qui sont utilisés dans certains pays, alors qu'ils sont interdits en France. Il y a donc une distorsion de concurrence : on ne va pas pouvoir continuer à nourrir les Français de manière qualitative, si le consommateur ne se réveille pas. Je suis éleveur de volailles : mes poulets, ils sortent en plein air, sont nourris avec des céréales françaises, donc ça fait un peu mal au coeur de se dire qu'aujourd'hui, la consommation de poulets augmente... mais pas la production française. 50 % du poulet consommé en France est importé.

Quels conseils pouvez-vous donner aux consommateurs qui veulent faire attention ?

L'origine France est étiquetée, donc normalement quand vous voyez le petit drapeau français sur un produit, ça aide. Ensuite, il faut peut-être prendre le temps de lire les étiquettes : quand on est dans un magasin, on n'a pas le temps, mais une fois rentré chez vous, n'hésitez pas à regarder attentivement. Sans oublier d'aller voir vos producteurs aussi, qui font de la vente en direct. Aujourd'hui, tout ce marché-là - la filière bio, le label rouge... - voit son économie dépérir petit à petit, parce que malheureusement, le consommateur se détourne de ces produits-là.