Colère des psychologues : "des patients seront exclus"

Ce jeudi 10 juin, une centaine de personnes ont manifesté à Angers et Laval. Les psychologues dénoncent une circulaire et un arrêté qui encadreraient la profession remettant en cause l'accès direct et libre au soin.

11 juin 2021 à 14h20 - Modifié : 11 juin 2021 à 15h49 par Alexis Vellayoudom

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Le 10 juin, les psychologues de la Mayenne protestaient contre l'encadrement de la profession
Crédit : Elina Quinton

"L'heure est grave", nous confie Vanessa Pinson, psychologue de l'éducation nationale en Mayenne. Ce jeudi 10 juin, une centaine de manifestants se sont rassemblés à Laval et Angers à l'appel de Force Ouvrière. Partout en France, des psychologues, de tout secteur, ont protesté contre la fleuraison de texte sur la profession. Préoccupés, ils craignent une mise sous tutelle de la profession et dénoncent la circulaire du 17 mai, l'arrêté du 10 mars et une proposition de loi sans concertation.


Des patients exclus du système de soin ?


Pour les manifestants, l'enjeu c'est l'accès direct et rapide au psychologue. Aujourd'hui, il suffit de se présenter chez un psychologue ou dans un centre médico-psychologique pour pouvoir profiter de leurs services. Demain, selon les manifestants, ça ne sera plus le cas. Le nouveau dispositif prévoit de trier les patients en fonction de la gravité de leur pathologie. Ils seront ensuite orientés, soit vers le libéral pour 10 séances remboursées, mais sous réserve d'une prescription médicale, soit vers les centres médico-psychologique.

Les psychologues ne veulent pas du tri des patients
Crédit : Alexis Vellayoudom

Par exemple, un patient qui souffre d'une pathologie "modérée" devra aller vers le libéral plutôt que vers les centres médico-psychologique. Mais il ne pourra bénéficier des 10 séances remboursées que s'il n'a pas vu de psychiatre dans les 3 dernières années, "on va avoir des patients qui vont être exclus. Des familles qui vont se retrouver sans proposition de soins", explique Vanessa Pinson qui exerce en primaire et dans des collèges. Le souci ? Le manque de moyens des CMP et CMPP où il manque des psychologues et des psychiatres. Les manifestants demandent le renforcement de ces structures plutôt que l'externalisation des soins.


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Les syndicats et la centaine de manifestants redoutent une mise sous tutelle de la profession
Crédit : Alexandre Boisseau

Un encadrement de la profession ?


Avec la prescription médicale, les psychologues dénoncent aussi une surveillance de la profession par le milieu médical dont ne fait pas parti la psychologie, "d'en passer par un médecin, c'est inscrire les patients dans un parcours de soins. Et ça amène à rencontrer plusieurs interlocuteurs au nom de la santé mentale. Ça voudrait dire qu'ils sont considérés comme malade", explique la psychologue.

La psychologie sous supervision de la médecine ?
Crédit : Alexis Vellayoudom

Une proposition qui pose problème sur la discrétion de certains patients et la réactivité, "il y en a qui font ces démarches sans en parler à leurs familles. De faire appel à un psychologue, c'est une démarche qui demande une réponse rapide", ajoute la psychologue.

L'autre nuage à l'horizon, une proposition faîte en avril pour la création d'un ordre des psychologues. Les manifestants craignent d'être supervisés et encadrer dans leurs pratiques, remettant en cause la pluralité de leurs métiers.


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Une centaine de manifestants ont protesté devant la préfecture d'Angers
Crédit : FO 49

La fin du choix ?


Autre ombre au tableau, l'arrêté du 10 mars. Selon les syndicats, il définirait qu'une lecture des difficultés des enfants, un trouble du neurodéveloppement, "ça veut dire que les méthodes de traitement et la lecture de ces troubles sont prédéfinies de manière unilatérale. C'est donc oublier la pluralité de nos formations et de nos méthodes. Finalement, on ne laisse plus aux patients la liberté de choisir son praticien", souligne la psychologue qui exerce auprès des primaires et des collèges.

"On a quelque chose qui est formaté"
Crédit : Alexis Vellayoudom

S'y greffe, le nombre de 10 séances déjà prédéfinies, "on a quelque chose qui est formaté. On a idée qu'en 10 séances ce sera réglé. Ça veut dire qu'on ne tient pas compte du patient, du travail qui va être fait au cours du suivi. On fait fit du temps du patient dans le travail avec son thérapeute", souligne Vanessa Pinson.