Reportage. Des anonymes s'inquiètent pour l'avenir de leur hôpital à Laval

Près de 400 personnes ont manifesté devant l'hôpital de Laval. Des Mayennais ont rejoint le cortège avec des syndicats, des soignants, des associations d'usagers et des élus.

23 septembre 2022 à 14h08 - Modifié : 23 septembre 2022 à 18h07 par Alexis Vellayoudom

Image d'illustration

Crédit : Alexis Vellayoudom

Hier, près de 400 personnes ont manifesté devant le centre hospitalier de Laval. Les syndicats, soignants et associations d'usagers appelaient à la défense de l'hôpital public où les effectifs sont en baisse, les lits ferment et les soignants s'épuisent. Pendant une heure, le cortège a marché sur le boulevard du 8 mai 1945 avant de se poser au rond-point et de revenir à l'hôpital. 


 


Des Mayennais inquiets pour l'hôpital public


 


Ils sont venus en tant qu'anonyme, mais plusieurs Mayennais ont fait le voyage de tout le département pour participer à ce rassemblement. Elle se fait discrète, près de la foule, Marie, retraité, est en colère. Avec ses amis, elles ont fait la route Ballots dans le Sud-Mayenne : "ça ne va pas du tout. Les soignants sont en souffrance et nous on n'arrive plus à se faire soigner. Un jour, j'étais malade, mon compagnon me dit, je t'emmène aux urgences, j'ai dit, c'est pas la peine, ils sont fermés et bien on reste chez nous. C'est pas normal". Plus loin dans le cortège, nous retrouvons une maman avec ses enfants, "je trouve ça important de défendre l'hôpital public et encore plus de venir avec mes enfants. C'est un peu pour eux qu'on va se battre. On a un service public en France qu'est quand même top, si on vient comme en Amérique à tout payer, les frais médicaux, ça serait trop dommage. Il faut garder nos services publics", confie Angéline, aide-soignante.


 

Titre :Reportage dans le cortège avec des anonymes

Crédit :Alexis Vellayoudom

 


En bout de cortège, un autre retraité a été sensible à un tract sur le marché de Château-Gontier, "on avait peur de la médecin à deux vitesses, mais la médecine à deux vitessse, elle est là. Je me suis fait opérer récemment. J'ai les moyens de me payer un surcoût et j'ai payé un surcoût pour mon chirurgien. Je ne lui en veux pas, mais ne serait-ce que ça existe, ça me met très en colère parce qu'il y a plein de gens qui n'ont pas les moyens de payer le surcoût que j'ai payé pour mon opération", témoigne Michel. Même colère pour Oliv, qui s'est déplacé naturellement : "il y a des temps d'attente invraisemblable aux urgences. L'hôpital de Laval a dû fermer ses portes plusieurs fois au niveau de ses urgences parce qu'il n'avait pas le personnel. Et c'est quand même assez scandaleux dans un pays aussi riche que la France". 


 


"Il ne faut surtout pas s'habituer à un service dégradé" - Caroline Brémaud, cheffe des urgences de l'hôpital de Laval


 


Parmi les meneurs, Caroline Brémaud, cheffe des urgences de l'hôpital de Laval. La figure locale est aujourd'hui devenue un symbole national des dysfonctionnements dans les services des urgences du pays. "La situation est critique parce qu'on a fait croire aux gens que c'était juste pour l'été que ça allait être difficile alors que nous en Mayenne, c'est difficile depuis le mois d'octobre et ça resterait difficile dans les prochains mois aussi donc il ne faut surtout pas s'habituer. Parce que, ce qu'on voit c'est que les gens s'habituent et si on s'habitue, on dégrade notre offre de soins et on le regrettera un jour donc il faut réveiller les gens et éveiller les consciences. On veut vraiment que l'État se saisisse de ce dossier qu'est fondamental parce que si l'on regarde que par la lorgnette des urgences, on va se tromper et on va droit dans le mur", lâche la médecin urgentiste. 


 

Titre :"Il ne faut surtout pas s'habituer", explique Caroline Brémaud

Crédit :Alexis Vellayoudom

 


Un constat que partagent les syndicats Force Ouvrière et la CGT, "on est dans la même situation qu'avant Covid. Ça fait des années que l'hôpital public se dégrade. Sur l'hôpital de Laval, il y a 1/3 des infirmiers arrivés cette année qui sont déjà repartis. On a trois foix plus de démission de soignants que l'année passée, ça montre qu'il y a un malaise", explique Sylvain Bihel, secrétaire adjoint de FO.  Pour la CGT et FO, il faut prendre des mesures rapidement : "d'un coup de baguette magique, on peut dès demain déprécariser 250 contractuels à l'hôpital Laval. On peut aussi instaurer des ratios, c'est-à-dire dire, il y aura tant de soignants pour tant patients, on vous garantit ça à l'aube de 2026 par exemple, le temps de former tout le monde. Renforcer l'accès à la formation en doublant les effectifs, recruter des formateurs, la formation ça va être crucial pour les années à venir". 


 


Les élus réclament des moyens pour l'hôpital


 


Les élus ont aussi intégré le cortège comme Florian Bercault, le maire de Laval, et quelques-uns de ces adjoints. Mais aussi le député mayennais Guillaume Garot : "il faut qu'on puisse voter les crédits suffisants, ça veut dire que l'hôpital ait des budgets suffisants pour bien fonctionner. Ça veut dire qu'il nous faut des soignants plus nombreux et mieux payés parce qu'aujourd'hui, on a une vraie crise de recrutement. On forme des infirmiers, des infirmières, des aides-soignants, des aides-soignantes, certains renoncent, certains démissionnent. Et puis aussi, il faut traiter la question des déserts médicaux parce que notre hôpital ne sera jamais attractif, si notre territoire autour ne l'est pas".


 

Des Mayennais ont rejoint le cortège des syndicats, des soignants et des associations d'usagers

Crédit : Alexis Vellayoudom

Il a d'ailleurs créé à l'Assemblée nationale un groupe transpartisan pour lutter contre les déserts médicaux. Le député de la 1ère circonscription veut une nouvelle fois proposer la régulation d'installation des médecins dans les zones sous dotées.